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Olivier Jardé compte sur ses testeurs pour s'imposer

Le 12 March 2013
Enquête commentaires

Olivier Jardé (Nouveau centre).

Ils seraient une cinquantaine, si l'on en croit Olivier Jardé. Une dizaine de «testeurs» répartis par groupe sur cinq zones de la ville (centre, nord, sud, est, et ouest). Quelle est leur tâche ? Demander aux personnes de leur entourage professionnel et personnel ce qu'ils attendent des prochaines élections municipales, ce que sont leurs priorités. «C'est une démarche thérapeutique, s'amuse Olivier Jardé, chirurgien. Cela se passe en trois phases, d'abord l'écoute, ensuite le diagnostic et puis les prescriptions.»

La première phase est en train de ce terminer. Tous les groupes finissent de «remonter» leurs informations, leurs tests. Des réunions visant à formuler des «diagnostics» et des «prescriptions» sont en cours. «On ira ensuite, de la même manière, tester nos solutions», assure le président départemental du Nouveau centre.

Qui sont les testeurs d'Olivier Jardé, qui -pour l'instant- n'est officiellement candidat qu'à un sondage devant départager les centristes dans la course à la mairie d'Amiens ? Lydia Bertrand, médecin en centre-ville d'Amiens, est de ceux-là. Elle n'est membre d'aucun parti politique. «Je fais partie de ces gens qui s'impliquent dans des actions citoyennes, explique-t-elle. À 18 ans, en 1979, j'ai failli être élue aux municipales de Poulainville sur une liste apolitique.»

Depuis, elle s'est investie dans son métier jusqu'à devenir secrétaire départementale du Syndicat des médecins généralistes. Elle connaît Olivier Jardé depuis bien longtemps, depuis l'époque de la fac où elle a été son interne. «On partage une vision centriste des choses, le fait qu'il y a des bonnes idées à gauche comme à droite et qu'il faut faire le tri.»

«Il n'est pas question de stratégie politique»

Si Lydia Bertrand s'implique dans ce travail de test, ce n'est «pas pour prendre un poste», mais plutôt parce qu'elle estime qu'à Amiens, où elle s'est installée en 2004, «les choses n'en finissent pas de se dégrader». Pointant tantôt les problèmes de propreté dans son quartier ou au parc de la Hotoie - «où je vais courir», les problèmes de transports, de baisse de la fréquentation des commerces du centre-ville «causée par les difficultés de stationnement», ou encore des problèmes de sécurité.



Lydia Bertrand, médecin en centre-ville d'Amiens.

«Les groupes de testeurs se sont formés à la fin de l'année dernière, en octobre. Depuis, on s'est vus quatre fois.» Quatre réunions durant lesquelles «il n'est pas question de stratégie politique». Ces réunions se déroulent soit chez l'un des participants, soit dans un café. «On liste tous les thèmes qui préoccupent les gens (l'économie, le transport, l'éducation...) et pour chaque thème on essaye de définir trois questions», explique Lydia Bertrand. Chaque testeur doit ensuite poser ces questions à son entourage. Pour la doctoresse, ses patients sont des interlocuteurs parfaits, étant donné qu'ils n'appartiennent pas tous aux mêmes catégories sociales. «Mais j'interroge aussi mes voisins, mes enfants, l'artisan du secteur...»

Des novices et des professionnels de la politique

Si elle se sentait des affinités centristes, Lydia Bertrand explique n'avoir jamais soutenu officiellement de candidat. Elle vient de franchir le pas. «Quand Olivier était député, à chaque fois qu'il intervenait à l'Assemblée sur une question de médecine, il prévenait tous les médecins de sa circonscription de ce qu'il avait dit et on pouvait en discuter. C'est ce genre de choses qui m'ont amenées à le soutenir aujourd'hui.» Elle confie d'ailleurs qu'il «n'était pas très chaud, au début, pour se présenter aux municipales, il voulait savoir si sa candidature pouvait être utile». D'où la création de groupes de testeurs.

On l'a dit, ces groupes sont au nombre de cinq. Mais un sixième groupe est en voie de formation: il s'agit un groupe «jeunes». Kevin Delépine, étudiant en sciences politiques à la fac d'Amiens, en est l'un des moteurs. Âgé de 22 ans, il s'est intéressé à la politique dès le collège «quand Jean-Marie Le Pen est arrivé au second tour en 2002». Puis c'est la présidentielle de 2007 qui l'a captivé. «Mais j'ai commencé à ne plus me retrouver dans les valeurs de l'UMP. Le côté sécuritaire était trop présent.»

Un groupe d'étudiants

L'an dernier, c'est l'un de ses amis, adhérent du Nouveau centre, qui lui a fait rencontrer Olivier Jardé. «On a alors commencé à parler politique.» Et, de la parole au geste, il milite en 2012 pour la réélection du centriste aux législatives, collant affiches et participant à l'organisation des réunions publiques, «mais je n'étais pas encarté».



Kévin Delépine, étudiant en sciences politiques à Amiens.

C'est désormais chose faite, depuis quelques jours, au Nouveau centre. Et aujourd'hui, il s'active dans le groupe de testeurs jeunes qui compte «5 à 6 membres, pas forcément cartés». Ce sont des étudiants en médecine, économie, sciences politiques, IUT. «On travaille en petits groupes sur des dossiers thématiques, puis on fait partager notre travail en réunion. Hier [jeudi dernier, ndlr], on était à la réunion sur l'économie.» Ce genre de réunion qui permet de rassembler les informations glanées par les différents testeurs.

Mais Olivier Jardé ne s'entoure pas que de novices en politique. D'autres, bien plus aguerris, participent de près ou de loin à ses réunions. Ainsi, la semaine dernière Roger Mézin, ancien bras droit de Gilles de Robien, est venu présenter ses solutions en matière économique et fiscale. La baisse de la fiscalité des entreprises (via notamment le versement transport) a été évoquée, ainsi que la baisse du nombre d'adjoints au maire ou l'interdiction pour un élu de cumuler les indemnités de la ville et de la métropole. Des pistes réflexions qui ne sont pas encore de vraies propositions.

«Gérer une ville, c'est une question de compétence»

Non loin de Roger Mézin, Philippe Théveniaud avait également répondu présent. Il est président de la Caf de la Somme, représentant local de Debout la République, le parti de Nicolas Dupont-Aignan, et surtout président de la CFTC Picardie.

«Ma présence n'était pas un soutien à la candidature d'Olivier Jardé, assure-t-il d'emblée. C'était une réunion sur l'économie, il y avait des chefs d'entreprises, des commerçants, moi je suis venu en tant que syndicaliste. Je ne suis pas sectaire, j'ai été invité, il y a peu, par les Jeunes populaires pour parler de Dunlop-Goodyear. Si le PS m'invite, je suis d'accord pour participer à un débat s'il est respectueux.»

Pas de soutien mais une participation active au processus impulsé par le candidat centriste. «C'est une démarche constructive. On teste chacun entre 10 et 15 habitants sur les attentes des Amiénois. Souvent, les gens parlent de choses simples, de qualité de vie.» Philippe Théveniaud explique avoir accepté de devenir testeur parce qu'il avait l'assurance de ne pas participer à un programme idéologique. «Entre Philippe Théveniaud (sic) et Olivier Jardé, il y a un fossé, indique-t-il. Nous sommes en désaccord sur la politique nationale et européenne. Mais gérer une ville, ce n'est pas une question de gauche ou de droite, c'est une question de compétence.»

Le syndicaliste pourrait rejoindre une liste d'opposition à l'actuelle majorité municipale, «si nous arrivons à nous unir sur un projet pour Amiens». Dans le cas contraire, Debout la République pourrait présenter sa propre liste. S'il est candidat, sur une liste ou une autre, Philippe Théveniaud abandonnera son poste à la Caf de Picardie, et s'il est élu, il lâchera les rênes de la CFTC Picardie, «en accord avec les statuts du syndicat».

Le suppléant de Brigitte Fouré avec Olivier Jardé

Parmi les testeurs d'Olivier Jardé, on trouve également désormais Olivier Mira, directeur de l'Association départementale pour la sauvegarde de l'enfance (ADSEA). «Je suis arrivé dans un second temps, j'avais besoin de réfléchir, d'essayer de ne pas trop brouiller les pistes». Car Olivier Mira est le suppléant de la conseillère générale Brigitte Fouré, également engagée dans la course à la tête de liste d'opposition aux municipales. Brigitte Fouré ne serait d'ailleurs «pas complètement d'accord» avec sa démarche. Pas très étonnant.

De son côté, Olivier Mira assure soutenir avant tout «la démarche du président du Nouveau centre» et essayer de «tout faire pour éviter la terre brûlée». Une terre brûlée qui reste dans le champ des possibles, puisqu'il imagine pouvoir être un recours en septembre prochain, si les choses tournent mal chez les centristes, «s'il faut quelqu'un au dessus de la mêlée».

Et de dessiner le portrait-robot du futur candidat d'opposition: «Il faut quelqu'un de moderne, qui puisse aller chercher des voies sur sa gauche. Car sans cela, la victoire est impossible à Amiens. Il faut également de grands projets structurants centrés sur les loisirs, la culture et les sciences.» En attendant ces projets structurants, la méthode des tests semble permettre, l'air de rien, de créer une dynamique et un collectif militant.

Dans l'œil du Télescope

J'ai rencontré Lydia Bertrand jeudi dernier, Kévin Delépine vendredi. J'ai pu m'entretenir par téléphone avec Philippe Théveniaud vendredi, Olivier Jardé et Olivier Mira hier.