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L'UDI sous tension avant la désignation

Le 24 July 2013
Analyse commentaires
Par Fabien Dorémus

Le parti centriste commence sérieusement à s'impatienter. Souvent annoncée, toujours repoussée, la date de la désignation de la tête de liste UDI à Amiens n'est toujours pas connue officiellement. Ce sera peut-être pour aujourd'hui. Car la commission nationale d'investiture du parti, composée de onze personnalités dont Jean-Louis Borloo, Rama Yade ou encore François Sauvadet, doit se réunir ce jour à Paris.

Dans une quinzaine de grandes villes en France, l'UDI attend toujours de connaître le nom de son (sa) candidat(e). Est-ce que la commission aura le temps de statuer sur tous les cas laissés jusqu'ici en suspens ? Rien n'est moins sûr. «J'ai appris à être prudente», indique Brigitte Fouré, candidate à la candidature tout comme Hubert de Jenlis.

Prudent, il faut l'être, car à plusieurs reprises les candidats devaient être reçus par la commission d'investiture nationale pour être auditionnés. Le 24 juin, notamment. Il était alors prévu que Brigitte Fouré, Hubert de Jenlis, et Olivier Jardé soient reçus. Olivier Jardé étant pourtant déjà éliminé de la course depuis la première étape de désignation qui consistait en un sondage départageant les deux candidats issus Nouveau centre, lui et Brigitte Fouré. Rappelons que l'UDI rassemble plusieurs partis dont le Nouveau centre et le Parti radical (dont est membre Hubert de Jenlis). Mais cette réunion du 24 juin n'a jamais eu lieu. Sans raison officielle.

Le sondage du Nouveau centre avait d'ailleurs déjà irrité quelques personnes à droite. Non pas en raison de la manière dont celui-ci a été effectué, mais en raison de la manière avec laquelle Brigitte Fouré en a rendu publics les résultats.

Crispations

Vendredi 14 juin, l'ancienne maire d'Amiens (de 2002 à 2007, en remplacement de Gilles de Robien alors ministre), s'est rendue sur le plateau de France 3 Picardie en dévoilant notamment l'ensemble des résultats qui concernaient la notoriété des candidats: Brigitte Fouré (82% des sondés la connaissaient), Alain Gest (70%), Olivier Jardé (63%), Hubert de Jenlis (35%) et Benoît Mercuzot (25%)

Or, il s'agissait d'un sondage commandé par le Nouveau centre et destiné à départager les candidats du Nouveau centre. Le fait de rendre publics les résultats obtenus par les candidats non membres de ce parti a fait grincer quelques dents.

Quelques semaines plus tard, lorsque Alain Gest fut investi par l'UMP à la suite d'un sondage similaire, cette fois commandé par son parti, il précisa qu'il n'en publierait pas les résultats. «Car il concerne aussi des candidats qui ne sont pas de mon parti», s'est-il justifié. À bon entendeur.

De son côté, Brigitte Fouré ne regrette rien : «J'ai fait ce que je pensais devoir faire, en accord avec Hervé Morin [président du Nouveau centre, ndlr]. Que j'en aie crispés quelques-uns, c'est possible, mais c'était la vérité des résultats.»

Si les candidats UDI n'ont toujours pas été reçus par la commission nationale d'investiture, peut-être ont-ils tenté de convaincre un à un les membres de la commission ? «Moi, je ne l'ai pas fait», assure Brigitte Fouré. Difficile de savoir si Hubert de Jenlis fait de son côté du lobbying. En revanche, l'ancien maire d'Amiens s'en est chargé pour lui.

L'ancien maire sème la discorde

Car Gilles de Robien, l'ancien maire d'Amiens, s'est invité dans le débat. Il milite activement au sein de l'UDI, dont il n'est pourtant pas membre, pour imposer Hubert de Jenlis. Les deux hommes sont proches, depuis longtemps. «Je pense que Gilles se reconnaît en lui, tente d'expliquer Brigitte Fouré. Ils ont la même profession [assureurs, ndlr], ils sont tous les deux membres de familles d'aristocrates.» Leurs familles respectives seraient également proches.

Mais certains, partisans d'Hubert de Jenlis, analysent différemment le soutien de l'ancien maire. «De Robien a expliqué que si sa génération était encore capable de l'emporter à Amiens, il irait lui-même, glisse une voix de l'UDI qui souhaite garder l'anonymat. Il ne faut pas faire la revanche [de 2008]. Et il nous faut un candidat capable de faire plusieurs mandats.» Hubert de Jenlis et Brigitte Fouré sont respectivement âgés de 44 et 57 ans.

Quant à Gilles de Robien, il minimise son influence sur la désignation. Il rappelle qu'il n'est plus membre d'aucun parti et assure ne pas faire de lobbying actif. «Quand je rencontre des amis, je leur donne mon avis, voilà tout.» Cet avis, il se gardera de le donner à la presse.

L'échec du compromis local

En revanche, pour d'autres, «Gilles de Robien fait une pression maximum! Il appelle Borloo, il appelle Lagarde, il donne son avis sans qu'on lui demande, tonne un militant UDI qui, lui aussi, veut garder l'anonymat. Il n'a plus mis les pieds à Amiens depuis six ans, sauf pour voir ses amis du Lions club!» Ambiance.

Si, officiellement, l'union est de mise à l'UDI, les tensions s'accroissent. Des tentatives de compromis ont pourtant été réalisées. D'après son entourage, Hubert de Jenlis aurait notamment proposé un ticket maire-président de la métropole à Brigitte Fouré. Mais celle-ci a refusé, pour des raisons politiques. «Le vrai pouvoir est à la Métropole mais la vraie élection est à la Ville, il est donc difficile que ces deux fonctions ne soient pas exercées par la même personne», indique-t-elle.

Sans compromis local, le national de l'UDI va devoir trancher. «Des militants vont peut-être être déçus mais on espère que ça n'aura pas de conséquences sur la campagne», indique-t-on dans l'entourage d'Hubert de Jenlis. Rien n'est moins sûr. Car certains militants évoquent déjà l'idée d'une «liste dissidente» si l'actuel conseiller général d'Amiens sud était désigné tête de liste.

Dans l'œil du Télescope

J'ai contacté Brigitte Fouré par téléphone lundi, puis de nouveau mardi pour des précisions. J'ai brièvement échangé par téléphone avec Olivier Jardé lundi. Il a simplement indiqué qu'il serait «à fond» derrière le candidat désigné, quel qu'il soit. Mardi, j'ai contacté Gilles de Robien. Je n'ai pas réussi à joindre Hubert de Jenlis. Entre lundi et mardi, j'ai contacté plusieurs autres membres de l'UDI amiénoise qui ont préféré témoigner anonymement.