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Les écolos ne comptent pas courir après le PS

Le 27 September 2013
Entretien commentaires (2)
Par Fabien Dorémus

Marion Lepresle et Christophe Porquier (EELV).

Europe-Écologie-Les-Verts (EELV) vient de composer une équipe pour mener la campagne de la prochaine élection municipale à Amiens. À sa tête, deux élus: Christophe Porquier, vice-président du conseil régional de Picardie (éco-développement, énergie-climat) et Marion Lepresle, adjointe au maire d'Amiens en charge de l'enfance, l'éducation et la restauration scolaire.

En 2008, les Verts avaient fait liste commune avec presque toute la gauche; seuls la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) et Lutte ouvrière (LO) faisaient bande à part. Avec le PS, le PCF, le MRC et le PRG, «on avait pu se retrouver sur un projet commun centré sur la démocratie, la solidarité et l'écologie», rappelle Marion Lepresle. Depuis le début du mandat, le groupe écolo du conseil municipal s'est fortement modifié. Une partie des élus qui le composent ont décidé de quitter le parti tout en restant dans le même groupe municipal (voir notre enquête).

Aujourd'hui, à moins de six mois du nouveau scrutin municipal, «alors que certains mettent d'abord en avant leurs candidats», EELV martèle que la priorité c'est le projet. Entretien.

Le Télescope d'Amiens: Quel bilan tirez-vous du mandat actuel ?

Christophe Porquier: On assume complètement d'avoir été dans l'équipe majoritaire. Il y a bien eu quelques retards sur la politique des transports, par exemple, mais les orientations sont les bonnes.

Marion Lepresle: C'est un bilan collectif et l'apport des écologistes a été important. Je suis satisfaite du bilan car nous avons apporté à la ville plus de démocratie et de transparence (attribution des logements et des places dans les crèches, dérogations scolaires), nous avons augmenté les aides aux plus démunis, apporté du bio dans la restauration scolaire et celle des crèches. Sur l'écologie, nous avons beaucoup misé sur les économies d'énergie lors des travaux dans les écoles. Il y a bien sûr l'école Michel-Ange [réhabilitée en bâtiment à énergie positive, ndlr] mais pas seulement. Par exemple à l'école Delpech, nous avons changé 800 fenêtres!

Quels sont vos réserves vis-à-vis de ce bilan?

ML: Il manque encore des voies réservées aux vélos et le stationnement résidentiel aurait pu s'étendre à Henriville et à Saint-Leu.

Le stationnement résidentiel, c'est payer pour pouvoir se garer devant chez soi. Ce n'est pas très populaire.

ML: Si les gens n'arrivent pas, actuellement, à se garer devant chez eux, ils préfèrent le stationnement résidentiel.

Quels sont vos projets pour le prochain mandat?

CP: Dans les transports, il faudra travailler sur l'intermodalité. Le tramway est un outil extraordinaire mais il doit être connecté à un réseau de bus performant, à des parkings relais, à des voies pour les vélos. Tout cela sans sanctionner les utilisateurs de voitures.

Notre vision de la ville, c'est celle d'une ville à taille humaine, c'est l'une des qualités d'Amiens. C'est la raison pour laquelle nous devons éviter de trop étendre la ville dans les futures opérations immobilières. Il vaut mieux identifier les dents creuses et travailler à densifier, même si cela coûte plus cher et demande davantage de concertation. Grâce à des opérations publiques d'aménagement, la collectivité peut aussi favoriser la rénovation thermique des habitations, en collaboration avec le conseil général et le conseil régional.

ML: Nous souhaitons réserver les terres agricoles périurbaines à l'alimentation de la ville, pour favoriser les circuits courts. La Ville peut s'en porter acquéreur et assurer des marchés à des maraîchers, notamment depuis que l'on a repris les cantines scolaires en régie publique. Nous souhaitons aussi augmenter le nombre de jardins potagers à destination des particuliers. Actuellement il faut attendre trois à quatre ans pour avoir un jardin.

Concernant l'emploi?

CP: Ce n'est pas en appuyant sur un bouton que l'on va régler tous les problèmes. Il y a 15 000 demandeurs d'emploi à Amiens. Attirer les entreprises, cela ne va pas se faire avec un pont d'or d'argent public, ce qu'il faut c'est des services publics performants. Des services de transports, de crèches, des activités culturelles, etc. Par ailleurs, avec le fret, la chirurgie faciale et le stockage de l'énergie, nous avons de nombreux atouts à mettre en avant.

Vous souhaitez vous unir à toute la gauche en 2014?

CP: Le bilan municipal est plutôt satisfaisant mais on n'a toujours pas d'interlocuteur au PS. Nous discutons aussi avec les communistes avec lesquels on travaille bien. Et il ne faut pas oublier que la tête de liste ne sera pas forcément socialiste.

ML: En 2008, nous nous sommes associés parce que nous avions partagé un projet. Et un projet écrit, sur lequel nous avons pu nous baser tout au long du mandat.

Si vous ne parvenez pas à vous entendre, vous pourriez partir seuls?

CP: Oui, c'est complètement envisageable. Et on n'attendra pas la dernière minute pour se décider. Avec le PS, il ne faut pas oublier que l'on n'a pas forcément la même vision du développement. Pour nous, toute croissance n'est pas bonne à prendre.

Dans un communiqué, vous expliquez conditionner aussi l'union à «une gouvernance clairement définie». Qu'est-ce que ça veut dire?

CP: Le processus de décision doit être clairement défini. Est-ce que tout se passe dans le cabinet du maire? Est-ce qu'il prend ses décisions seul avec le DGS [directeur général des service, ndlr]? Ou est-ce que l'on met en place une vraie concertation?

Depuis 2008, il y a un manque de concertation à la mairie?

ML: Pas depuis 2008. C'est arrivé petit à petit. Progressivement, il y a eu de moins en moins de concertation.

CP: À l'avenir, il faudra aussi mettre en place une instance de concertation entre les deux exécutifs, la Ville et la Métropole.

Vous êtes favorable à ce que le maire d'Amiens soit le président d'Amiens métropole?

CP: Nous n'avons pas de religion là-dessus. En première intention, il semble que ce soit mieux qu'il occupe les deux postes. Après, on peut imaginer autre chose. Ce qui est sûr, c'est que faire un accord électoral comme celui à droite entre Brigitte Fouré et Alain Gest et, après seulement, se demander comment ça va marcher, c'est mettre la charrue avant les bœufs.

Nationalement, votre parti connaît des remous. Pascal Durand quitte la tête d'EELV, Noël Mamère quitte complètement EELV et appelle les écologistes à sortir du gouvernement. Est-ce que cela vous impacte?

CP: Nous, on fait notre travail ici, en région. C'est sûr que ça ne donne pas une bonne image du parti. Mais Noël Mamère est un spécialiste des déclarations individuelles sans concertation. Au niveau national, on a une députée qui se tient plutôt à distance de tout ça. Et lors de la conférence environnementale, on a obtenu des choses pas ridicules.