Tendue, très tendue, la reprise des débats au conseil général ce matin. Après les incidents de vendredi (voir notre article), la plupart des élus d'opposition ont pratiqué la politique de la chaise vide. À 9h30 ce matin, seuls trois élus étaient présents: Jérôme Bignon (UMP), Hubert de Jenlis et Marc Dewaele (UDI). Ces absences ne perturberont pas plus que cela le vote du budget car le quorum a été respecté (il fallait au moins 24 élus sur 46 pour que la séance se tienne).
Les sièges vides de l'opposition, ce matin.
Jérôme Bignon a pris la parole en début de séance pour demander une modification du procès verbal de la séance de vendredi. Une demande qui a entraîné une étonnante passe d'armes avec Francis Lec (PS). «Ce que j'ai dit vendredi n'est pas ce qui est marqué dans le procès verbal», a indiqué Jérôme Bignon, pour justifier sa demande. «Vous mettez en cause le travail de greffe du conseil général !», a attaqué Francis Lec.
Pour comprendre cet échange un peu musclé entre les deux élus, avocats de surcroît, rappelons que vendredi, Jérôme Bignon avait dénoncé l'inexactitude d'un extrait du Code général des collectivités territoriales cité par Francis Lec. Le président, Christian Manable, a souhaité calmer le jeu et a demandé une suspension de séance de cinq minutes pour laisser le temps au conseiller général UMP de formuler par écrit sa demande de rectification du procès verbal. Finalement, la rectification a été approuvée à l'unanimité.
«Les tribunaux auront à en statuer !»
Après ce premier round, l'élu UMP a repris la parole: «Nous sommes venus pour valider le procès verbal mais nous ne siégerons pas pendant le budget.» Pourquoi? L'opposition, qui avait demandé des documents comptables vendredi dernier, s'est plainte du délai d'envoi : «On devait nous les envoyer dans l'après-midi, je ne les ai reçus qu'à 19h12 dans ma boîte mail.»
Mais surtout, c'est la procédure d'urgence, déclenchée vendredi par la majorité, qui a provoqué l'ire de l'opposition. Les élus de droite exigeaient en effet un report de douze jours de la session budgétaire afin d'avoir le temps d'examiner les documents demandés. La majorité a raccourci ce délai à un jour franc. «Vous utilisez la procédure d'urgence, qui est un raccourcissement des droits de l'opposition, parce que vous avez fait une erreur, a lancé Jérôme Bignon. Les tribunaux auront à en statuer!»
La réaction ne s'est pas fait attendre. David Lefèvre, conseiller général du groupe Avenir en Somme (Modem et apparenté) a fustigé l'attitude de l'opposition. «Je viens d'entendre parler d'urgence, commence-t-il avant d'évoquer le cas d'une dame de 72 ans vivant dans la misère dans son canton de Friville-Escarbotin. Elle est là la vraie urgence ! Ce n'est pas le moment d'engorger les tribunaux administratifs pour des questions politiciennes, on perd du temps !» Puis de s'en prendre à la politique de la chaise vide jugée «antidémocratique et anti républicaine».
David Lefèvre (app. Modem) a fustigé l'attitude de l'opposition.
Francis Lec a enchaîné: «Les documents étaient annexés au dossier, vous ne les avez jamais demandés la semaine dernière, pendant la commission des finances. On ne fera pas croire à nos concitoyens que c'est un motif pour ne pas siéger. C'est une désertion, une erreur, une faute politique grave.»
Troisième salve avec le président Christian Manable, qui a déploré la politique de la chaise vide: «Une méthode que nous n'avons jamais utilisée quand nous étions dans l'opposition. Surtout que la critique porte sur des arguties de forme et pas sur le fond. La gestion du conseil général se fait ici et pas dans les tribunaux.»
Le dernier clou fut enfoncé, comme le premier, par David Lefèvre: «Je demande à ce qu'il y ait un retrait d'indemnités pour les élus dont l'absence est injustifiable.» Christian Manable a acquiescé, rappelant que les absences des élus sont justifiées en cas de maladie ou pour raison professionnelle.
À 10h32, la session a pu reprendre son cours, avec la poursuite de l'examen des rapports de commissions. Mais sans l'opposition.