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jean-francois vasseur

Pour une nouvelle donne à Amiens, vite!

Le 27 February 2014
Tribune commentaires

Je salue la lucidité et le courage de Dominique Théo. Je partage l'essentiel de son analyse [voir ici, ndlr] de la situation politique locale et la campagne des municipales.

J'ai participé activement à la campagne de Demailly en 2007/2008 face à Robien. Je ne regrette rien.

En six ans, j'ai fait plus de 400 commissions d'appel d'offres sans mise en examen ! J'ai présidé 6 ou 7 procédures de délégation de service public et j'en revendique tous les aboutissements. J'ai transformé l'Agence Susi en syndicat mixte départemental utilisé par tous les partenaires, doté d'un schéma d'aménagement numérique en cours de mise en œuvre, et parfois cité en exemple. J'ai piloté le redressement financier du Zénith et constitué un capital autour de partenaires que beaucoup nous envient.

En matière de développement économique, et malgré des États généraux de l'économie, le rapport de forces ne m'a jamais été favorable et je n'ai pas réussi à imposer la cause des entreprises et de l'emploi: c'est un échec.

Les circonstances aujourd'hui sont différentes et les protagonistes ont changé. J'en tire les conséquences. Il faudra, un jour, prendre le temps de construire des convictions plutôt que de gérer des émotions. Se départir de deux anomalies mortifères:

1 - la mascarade des désignations: qu'on prône "l'union solidaire des partis" ou qu'on accepte les combinaisons d'arrière-boutique: c'est toujours le bal des vanités et les arrangements entre délégués de haras partisans qui ne vivent que pour préparer aux tiercés électoraux. Au bout du compte on retrouve le même dosage entre quelques prophètes bardés de certitudes (chez qui coexistent le goût de l'aventure et l'aversion pour le bonheur, disait Cioran) ce qui les conduit immanquablement à confondre service public et sévices publics; les traditionnels ravis de la crèche, n'ayant jamais rien à dire, toujours d'accord sur tout, mutins de Panurge qui confondent solidarité et allégeance. Le même huis-clos, les mêmes mythes des hommes/femmes providentiel(le)s, de l'exemplarité moralisante et du volontarisme verbal comme arme fatale: "Vous allez voir ce que vous allez voir!"

2 - le poujadisme lyrique des discours: le sacro-saint socle commun de valeurs communes, impossibles à cerner compte tenu des divergences, des contradictions, des concurrences, ne suffit pas. Ces "accords" se résument à un syncrétisme, asile de toutes les compromissions et renoncements. Un grand flou artistique sur les priorités et les temporalités, les méthodes et les modes de fonctionnement occultés au profit des catalogues de "propositions originales"... resucées à l'infini et auxquelles plus personne ne croit.

Les moyens sont délibérément évacués du débat sinon sous forme de proclamation sur la "rigueur", les "économies" ou les "baisses d'impôts". Plusieurs leviers de maîtrise des dépenses existent, encore faut-il les exposer. Mais cela ne suffit pas et impose de passer en revue l'offre publique de la collectivité pour éliminer toutes les dépenses qui ne sont pas de service public ou considérées comme prioritaires (les budgets du bloc communal prévoient plus de 530 millions d'euros d'autorisations de programmes, soit plus que l'investissement sur la durée d'un mandat, et on en rajoute allègrement). L'invocation des "valeurs" ne permet pas de suppléer à l'incapacité à agir efficacement après, faute de transparence avant.

On a aujourd'hui des candidats qui séduisent peut-être les électeurs, même s'ils perdent les citoyens. Agir démocratiquement suppose que les alternatives soient présentées devant l'électeur et non négociées après coup, derrière son dos. Plus aucune décision politique ne sera imposée sans être appropriée par ceux qui la subissent. Cela implique une temporalité politique nouvelle, avec en premier lieu la pédagogie des enjeux et la compréhension des débats, puis l'acceptation de la contestation et de la remise en cause.

Je n'ai aucune illusion sur les positionnements de la droite et les réponses qu'elle est susceptible de produire. La rhétorique du changement, bien adaptée au rôle d'opposants, vole en éclats à l'épreuve de l'exercice du pouvoir.

Mais j'ai aussi la conviction qu'il est nécessaire de critiquer la gauche depuis la gauche. On peut être de la famille et décrire sans complaisance l'état où elle se trouve.


Le mot de la rédaction

Jean-François Vasseur est quatrième vice-président d'Amiens métropole, avec la compétence du développement économique. Ancien membre d'Europe écologie-Les Verts, il a été élu en 2008 sur la liste de Gilles Demailly. En 2014, s'il a été volontaire pour rempiler, il ne fait pas partie de la liste de Thierry Bonté. Il co-anime le think-tank amiénois "Amiens: La fabrique".

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