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Salouël: un hôpital, un tram et deux candidats

Le 19 March 2014
Interview commentaires

Jacques Boyer, conseiller municipal PS.

Dimanche, lors du premier tour des élections municipales, le maire sans étiquette Jean-René Hémart aura devant lui la liste «Ensemble avec la gauche pour Salouël» avec à sa tête Jacques Boyer, conseiller municipal étiqueté PS.

Dans la quatrième ville de la métropole, les projets se bousculent: agrandissement du campus, monosite de l'hôpital en construction et, peut-être, l'arrivée du tramway... Des projets qui ne dépendent pas uniquement de la Ville mais qui concernent toute la population de l'agglomération et qui pourraient modifier considérablement le paysage du sud-ouest amiénois.

Le maire sortant, Jean-René Hémart (sans étiquette), 60 ans, est employé au service des finances d'Amiens métropole. Cette fonction lui interdisant de siéger au conseil métropolitain, il envoyait jusqu'à présent deux adjoints et deux Conseillers siéger avec les autres représentants des communes de l'agglomération. Cette fois-ci, il a pris la décision de se mettre en disponibilité et donc de prendre son siège au conseil à partir d'avril, s'il est élu. Jean-René Hémart n'est encarté nulle part, il se décrit comme «apolitique».

Face à lui, c'est Jacques Boyer. 67 ans, professeur d'histoire à la retraite, secrétaire de section du PS de Salouël qu'il a fondée en 1986. Si l'homme a connu ses premières manifestations à l'âge de 15 ans pendant la guerre d'Algérie, il explique s'être engagé dans la politique municipale après que Jean Letellier, maire de Salouël entre 1979 et 1990, ait fortement endetté la ville. Nous leur avons posé les mêmes questions: entretiens croisés.

Le Télescope: Quels sont les principaux points de votre programme?

Jacques Boyer: D'abord, faire passer des idées qui peuvent être de gauche et de promouvoir des mesures sociales qui profitent aux Salouasiens. C'est ce que nous tentons de faire depuis des années en étant dans l'opposition.

Le deuxième point est de promouvoir le développement durable. Mais les deux sont liés. Il s'agit d'avoir une vision globale de ce que l'on veut proposer aux habitants de Salouël. Il y a énormément de choses à faire en matière d'économie d'énergie. Et cela concerne directement la qualité de vie des habitants autant que l'attractivité de notre ville.

Jean-René Hémart: Mon programme s'inscrit dans la continuité de ce que nous avons fait pendant le premier mandat. L'objectif de notre second mandat sera donc de continuer dans la voie que nous avons engagé. Nous allons donc maintenir un taux d'imposition faible, puisque les habitants de Salouël bénéficient d'un des taux d'imposition les plus faibles de la métropole après l'abaissement de 15% que nous avons réalisé en 2009. C'est une nécessité pour l'attractivité de la ville.

Ensuite, nous voulons continuer à aider la jeunesse toujours davantage. Salouël accompagne ses enfants de la naissance jusqu'à l'entrée dans l'age adulte: nous subventionnons la crèche, l'école, nous avons mis en place un centre de révision pour le bac, nous organisons des sorties au ciné Saint-Leu, et nous leur offrons également la carte de bus à partir d'un certain âge.

Qu'est-ce qui vous différencie de votre opposant? Que lui reprochez-vous?

J.B.: Il y a beaucoup de choses sur lesquelles nous ne sommes pas d'accord. Le maire sortant n'a pas de vision globale, nous lui reprochons son manque d'ambition, dans une ville qui, pourtant, se situe à un tournant décisif.

Il ne semble pas avoir pris la mesure du changement, des transformations opérées à Salouël et qu'une gestion différente s'impose. Il faut à la ville une ambition nouvelle. Si nous ne prenons pas le changement en main, d'autres le feront à notre place, et peut-être pas dans le sens que les Salouasiens pourraient souhaiter.

J.-R. H.: Je ne lui reproche rien et nous avons d'ailleurs des choses qui nous rassemblent comme la volonté de travailler dans l’intérêt de notre ville. Nous avons beaucoup travaillé ensemble et monsieur Boyer a voté favorablement à une bonne partie des délibérations, ce qui prouve également que nous avons bien fait notre travail au cours de ce mandat. Mais bien sûr nos idées et nos avis divergent sur certains point. Ce que je peux lui reprocher c'est de ne pas donner son programme.

Quelles sont pour vous les problématiques principales de Salouël, les véritables enjeux de ces élections?

J.B.: Le gros morceau c'est bien sûr l'arrivée du monosite [l'hôpital, ndlr] avec les problèmes de circulation qui vont se poser et la capacité qu'on aura ou pas à les régler et à en tirer avantage. Mais il faut prendre les choses de plus haut. Dans une ville de ce niveau, il va nous falloir développer plein de choses autour: hôtellerie, restauration... Il ne s'agit pas d'avoir uniquement les inconvénients, c'est aussi une belle opportunité de se développer qui s'offre à nous.

J.R.-H.: Des problématiques il y en a beaucoup. Mais nos administrés connaissent les travaux qui ont été effectués, et c'est ce que relate notre profession de foi.

Quel bilan tirez-vous de ce mandat qui s'achève?

J.B.: Le bilan n'est pas mauvais. Un certain nombre de choses ont été faites mais ce n'est qu'une addition de petites choses qui n'ont pas vraiment de lien entre elles. L'actuelle majorité fonctionne avec l'esprit de petit village. Mais nous avons plus de 4000 habitants, ce qui fait de nous la quatrième plus grande ville de l'agglomération. Il manque d'une politique globale.

Toutefois, au conseil municipal de Salouël, nous votons favorablement aux propositions que nous jugeons utiles et intéressantes. Il est important d'offrir à notre ville une opposition constructive.

Par exemple, à la cantine municipale, nous sommes parvenu à établir des tarifs en fonction du quotient familial, ce qui n'était pas le cas auparavant.

J.-R. H.: Je dirais que le bilan est vraiment bon. Nous n'avons bien sûr pas pu faire tout ce que nous voulions mais le mandat a été bien maîtrisé dans son ensemble: nous avons réalisé des travaux importants et nécessaires à la population comme le centre de loisir ou le marais aménagé en circuits de promenade par exemple, nous avons entrepris beaucoup de travaux de rénovation, de construction... Et, de plus, les finances de la commune sont bonnes.

Après l'implantation du nouvel hôpital, on parle d'un parc-relais pour le tramway à Salouël. Quels problèmes cela pourrait-il poser?

J.B.: Il va falloir régler des problèmes d'accessibilité. Déjà maintenant cela amène des milliers de véhicules quotidiennement. Il y aura bientôt un flux encore plus important, donc beaucoup de personnes à accueillir, pourquoi ne pas les accueillir à Salouël à ce moment là? Et puis nous pourrons aussi implanter des commerces qui pourront aussi servir aux habitants de Salouël. Comme je vous l'ai dit, il ne s'agit pas d'avoir uniquement les inconvénients.

Un transport en commun performant comme le tramway résorberait en partie les problème de circulation, mais une bretelle sur la rocade desservant l’hôpital est indispensable.

J.-R.H.: Déjà, il est vrai que l'arrivée du monosite Hôpital Sud nous pose un grand nombre de problèmes: d'abord, un CHU ne paye pas d’impôts, il occupe une grande place sur notre territoire mais ne rapporte rien à la ville directement. Ensuite, il crée pour nous une surcharge de travail en raison du nombre accru de naissances et de décès, ce qui obligera la municipalité à embaucher des personnes supplémentaires pour s'occuper de l'état-civil [la voie de la mutualisation des moyens avec la Métropole est envisagée depuis plusieurs mois, ndlr]. Et cela entraîne bien sûr une augmentation de notre budget de fonctionnement.

Et puis, évidemment, l'implantation d'un site de cette importance engendre également quelques désagréments comme une circulation très forte dans la ville. Par exemple, lundi dernier il y a eu de gros problèmes de circulation et l'avenue du golf s'est retrouvée complètement engorgée. Comme je l'ai déjà dit, j'ai peur qu'un jour un patient meure dans l'ambulance.

Sur le principe, nous ne pouvons évidemment pas être contre l'arrivée du tramway à Salouël, mais celui-ci devra s'accompagner d'aménagements tels que la création d'un barreau reliant la rocade aux parcs-relais afin de diminuer la circulation dans Salouël.

Quelles sont vos relations avec Amiens métropole? Les enjeux changeraient-ils si Amiens passait à droite?

J.B.: Cela pourrait avoir de grandes incidences dans la mesure où Amiens métropole contrôle la plus grande partie des compétences comme le sport ou la culture. La coordination avec Amiens métropole est très importante pour nos intérêts, il faut jouer le jeu.

Quelle sera l'attitude de la prochaine équipe en place envers une ville comme Salouël? Je ne peux pas le dire pour l'instant. Je crains que la politique qui serait menée soit une politique qui aille à l'encontre de ce qu'on veut nous, concernant le tramway notamment.

Brigitte Fouré a été maire d'Amiens pendant six ans. Qu'avez-vous retenu de son passage à la tête d'Amiens? Demandez-le aux gens...

J.-R.H.: Nous devons évidemment travailler en coordination avec Amiens métropole sur un certain nombre de dossiers pour lesquels nous avons besoin de leur aval. Par exemple, nous avons pour projet de créer une école de musique à Salouël [voir notre article, ndlr], nous devons pour cela convaincre Amiens métropole de l’intérêt d'implanter un tel centre artistique sur la commune.

Qu'Amiens passe à droite, cela ne changerait pas grand-chose pour moi et cela ne fait pas partie de mes préoccupations. J'entretiens des rapports tout à fait cordiaux avec Thierry Bonté, même si, il est vrai, j'ai plus d'affinités avec Brigitte Fouré, que je connais mieux.

Dans l'œil du Télescope

J'ai rencontré Jacques Boyer mardi 11 mars à la maison de la culture d'Amiens. J'ai ensuite rencontré Jean-René Hémart le lendemain dans ses bureaux de la mairie de Salouël.