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La Ville espère pallier le désengagement de l'État

Le 21 November 2013
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Par Mathieu Robert

D'ici la fin de l'année, les élus du conseil municipal d'Amiens doivent voter le budget de la ville pour 2014. Ce soir à 18 heures, les grandes lignes du budget seront présentées, dans la salle des Assemblées de l'Hôtel de ville, par le vice-président aux finances Jacques Lessard. Il défendra son projet devant les autres élus municipaux.

C'est ce que l'on appelle formellement le débat d'orientation budgétaire (DOB), qui doit se tenir depuis 1992 dans toutes les collectivités de plus de 3500 habitants, et ce dans les deux mois qui précèdent le vote du budget.

À Amiens, le budget de la municipalité, ce n'est plus ce que c'était. Car comme nous l'expliquions en septembre, la plus grande partie du pouvoir est, depuis l'année 2000, dans les mains de la communauté d'agglomération Amiens métropole.

D'ailleurs, dans le budget 2013 d'Amiens, 55 millions d'euros (sur 128 au total) de dépenses étaient destinés à payer Amiens métropole pour les services rendus par ses équipes dans le périmètre de la ville d'Amiens.

La Mairie ne dispose plus que de quelques compétences: écoles primaires et maternelles publiques, action sociale (CCAS), état civil, urbanisme et sécurité. «Plus grand-chose», de l'aveu du maire d'Amiens et président de la Métropole, Gilles Demailly. Ce soir, il ne sera donc pas question des grands chantiers de la capitale picarde, que sont le tramway et la citadelle.

À Amiens, l'État se retire moins vite qu'ailleurs

Ce que propose Jacques Lessard, c'est un budget proche, dans ses grands équilibres, du précédent. «Nous ne sommes pas inquiets pour le budget 2014», sourit le maire.

Difficile à croire dans le contexte actuel. En effet, en juillet dernier, le gouvernement annonçait une baisse des dotations de l'État aux collectivités locales à hauteur d'1,5 milliard d'euros en 2014, et autant pour 2015.

Pour la ville d'Amiens, cela devrait représenter une baisse de la Dotation globale de fonctionnement (DGF), versée par l'État, de presque un million d'euros en 2014, estime l'équipe municipale. «Cette dotation augmentait chaque année avec l'inflation. Mais depuis 2008, il y a eu un basculement», commente Jacques Lessard. De 2003 à 2013, la DGF de la ville d'Amiens a fait le yoyo, augmentant d'1,8 million d'euros pendant cinq ans, et baissant d'1,5 million d'euros les cinq années suivantes.

Heureusement pour les comptes de la municipalité, l'État vient compenser en partie cette baisse. En effet, la ville d'Amiens bénéficie de la Dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSUCS), destinée aux communes de plus de 10000 habitants les plus défavorisées. «La moitié des habitants ne paye pas d'impôts», rappelle Jacques Lessard. Et cette dotation devrait augmenter de 450 000 euros en 2014, estiment les services de la mairie.

Heureusement également que les villes françaises sont solidaires entre elles, au travers du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FNPIC). La dotation d'Amiens devrait ainsi augmenter de 300 000 euros l'année prochaine. «Si ces mécanismes n'existaient pas, la ponction serait sévère, commente Gilles Demailly, plus inquiet en revanche pour le futur budget de la Métropole. Mais tout arrêt de la progression des recettes nous inquiète, parce qu'en face il y a une rigidité de l'augmentation des dépenses».

Hausses des dépenses imposées par le gouvernement

Parmi ces dépenses nouvelles pour la ville d'Amiens, celles engendrées par la réforme des rythmes scolaires. À Amiens, la semaine de quatre jours et demi ne sera mise en place qu'à la rentrée prochaine, mais son coût reste élevé: 150 euros par enfant, selon le maire. Soit 1,5 million d'euros à trouver pour occuper les 10 000 enfants de la Ville. Mais Gilles Demailly estime que l'impact de la réforme ne devrait pas modifier l'équilibre du budget 2014. Ces dépenses ne concerneront que la fin de l'année 2014. Cela aura plus d'impact sur le budget 2015».

Autre augmentation venue du gouvernement, celle de la masse salariale. La Mairie est, aujourd'hui par l'intermédiaire de la Métropole, un patron comme les autres. Mais le barème de rémunération de ses salariés est fixé par le ministère de la Fonction publique. Celui-ci a annoncé que les fonctionnaires de catégorie C, les plus bas salaires, verront leur rémunération augmentée au 1er février 2014. Entre 4,6 et 46 euros par mois selon les cas.

Pas d'augmentation des taux

En revanche, c'est de son propre chef que la majorité municipale a décidé de faire contribuer la Ville au financement de la mutuelle de son personnel. Mais aussi de financer le recrutement, au travers d'Amiens métropole, d'une centaine d'Emplois d'avenir depuis 2012. Au total, les dépenses de personnel devraient augmenter de 3% en 2014.

En face de ces dépenses, l'équipe municipale ne souhaite pas augmenter les taxes foncières (bâti, non bâti, ordures ménagères) et d'habitation. «Les taux ne changeront pas», assure Gilles Demailly. Néanmoins, le montant global perçu par la Ville devrait augmenter avec le nombre de logements et avec l'inflation. En effet, même si les taux d'imposition ne changent pas, le montant payé par chaque habitant imposable augmentera, car l'assiette d'imposition sera élargie comme chaque année d'un taux corrélé à l'inflation.

Cependant, cette année, la taxe foncière pourrait augmenter moins vite que prévu. «D'habitude, l'augmentation était calculée sur l'inflation prévisionnelle, qui est de 1,3% pour 2014, explique Jacques Lessard. Mais il semble que cette année, même si ce n'est pas encore voté, les taux soient calculés sur l'inflation constatée en 2013 qui est de 0,9%. Ce sont quelques centaines de milliers d'euros en moins». Globalement, estiment le maire et son adjoint, les recettes de la Ville devraient augmenter «un peu».

Au total, le solde de recettes et des dépenses courantes, hors investissement devrait être positif. C'est en tout cas, l'idée défendue par l'adjoint aux finances: «Nous surveillons que notre excédent brut de fonctionnement soit autour de 20 à 30 millions afin de conserver des capacités d'autofinancement», explique l'élu communiste. «Après vous pouvez utiliser 10 millions pour le remboursement de la dette par exemple, ajoute le maire. Et il vous reste 10 millions d'autofinancement pour les investissements.»

Ces investissements devraient être particulièrement importants sur les réseaux de chaleur et les logements, a annoncé le maire. Son montant est habituellement compris entre 20 et 30 millions. Mais le détail en sera connu dans la suite des débats budgétaires.