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La fièvre «anti-austérité» gagne timidement Amiens

Le 25 September 2012

«Non à l'austérité perpétuelle en Europe». La pétition circule déjà sur internet depuis le début de l'été. Un appel à voter non, lancé aux députés français, qui discuteront de la loi de ratification du TSCG et la loi organique sur les finances publiques, à partir du 2 octobre prochain. La pétition a déjà été signée plus de 14 000 fois sur internet, mais sur le terrain, à Amiens, la mobilisation est encore modeste.

 


Frédéric Viale d'Attac: «Je ne sais pas si le changement, c'est maintenant, mais l'austérité, oui».

Mardi dernier, salle des provinces, une vingtaine de personnes seulement avaient répondu à l'appel du collectif unitaire constitué autour de militants des partis du Front de Gauche et de membres de l'association Attac, pour une soirée d'information sur le TSCG, le «traité d'austérité». Une première timide, à Amiens, pour ce mouvement qui semble, cependant, être parti pour durer.

Une rupture totale avec l'esprit du TSCG

Premier constat, pour les opposants au TSCG, à gauche du Parti socialiste (PS), la rupture avec le texte est totale.

Ils s'opposent frontalement, aussi bien sur le fond - «austéritaire» - que sur la forme – autoritaire. Pour Frédéric Viale, animateur d'Attac France et orateur de la soirée, il ne s'agit pas moins que d'un «attentat à la démocratie comme il n'y en a pas eu depuis 60 ans».

Des propos alarmistes, mais peu d'auditoire ce soir là, à Étouvie. «Le temps est très réduit entre les élections présidentielles et le vote du TSCG, on est un peu pris de court», regrette Jeff Moronvalle, président d'Attac Somme, «c'est une campagne éclair».

Pour Julien Vicaine, porte-parole de Gauche unitaire (Front de gauche) à Amiens, il s'agit tout de même d'un début prometteur. «Pendant les présidentielles, les réunions du Front de Gauche réunissaient une quarantaine de personnes. Mais si l'on compare à la dynamique de la campagne de 2005 [référendum sur la constitution européenne, ndlr], où il a fallu des semaines de réunion pour mobiliser, on est en avance.»

Peu de temps pour mobiliser d'ici le vote des parlementaires, début octobre. Pourtant le temps n'a pas manqué si l'on considère comme l'explique Frédéric Viale, que le TSCG n'est pas «un éclair tombé dans un ciel bleu». Le Traité complète en effet le Mécanisme européen de stabilité (MES), décidé au Conseil européen dès décembre 2010, et dont les textes incluaient déjà des mesures d'austérité pour les pays concernés.

Un Pacte de croissance insuffisant pour les « anti-austérité »

Un retard à l'allumage, à mettre au compte des élections présidentielles de mai dernier, et des promesses électorales de François Hollande. «Nous n'étions pas du tout dans la même situation politique qu'aujourd'hui», explique Julien Vicaine. «La question de l'austérité était au cœur des débats des présidentielles, mais l'enjeu était de savoir comment cela allait se traduire dans les urnes. Et Hollande assurait dans les discours qu'il ne prendrait pas la voie de l'austérité».

Quelques mois plus tard, les militants du Front de gauche crient à la trahison des promesses du candidat Hollande, qu'ils ont concouru à faire élire au deuxième tour. Le Pacte de croissance négocié par le nouveau président français ne leur suffit pas comme gage « anti-austérité ». «Le Président s'était engagé à renégocier, il a obtenu des briquettes. C'est le même traité, Ayrault l'a dit lui-même. Et ce n'est pas le Pacte de croissance qui va infléchir le traité. Comment faire le changement dans un tel carcan?», tonne Joël Carliez, premier secrétaire de la fédération du PCF dans la Somme. «Le texte revêt une portée historique», tranche Julien Vicaine. «Le ratifier reviendrait à cautionner les politiques mises en place en Grèce ou au Portugal».

Au niveau national, des députés PS, dont Pascal Boistard dans la Somme, devraient voter pour la ratification du traité, sans être convaincus sur le fond, afin de ne pas mettre François Hollande en mauvaise posture dans les négociations européennes. Une rhétorique que ne goûtent pas les militants du Front de gauche: « François Hollande fait aussi ce qu'il sent qu'il peut faire, analyse Julien Vicaine. Nous voulons montrer qu'il y a une mobilisation en France contre l'austérité et qu'il peut s'appuyer sur nous. Pour avoir notre place en Europe, François Hollande pense qu'il faut faire pareil que l'Allemagne, mais la France peut être moteur dans les politiques anti-austéritaires.»

L'opposition au TSCG ne se fera pas seulement entendre dans les rangs de l'Assemblée nationale, où siègent seulement 10 députés du Front de gauche, mais aussi dans la rue, avec comme première étape, la manifestation du 30 septembre à Paris. «Le 30 septembre sera un moment décisif, mais ce n'est qu'une étape», prévient Julien Vicaine. Pour les militants, le combat promet de s'inscrire dans le temps. «Un travail de longue haleine», promet Joël Carliez.


Des militants, place Gambetta, ce week-end.

Samedi, des militants du Front de gauche distribuaient déjà des tracts, place Gambetta à Amiens. «L'accueil est plutôt bon, même si c'est toujours difficile, ici, les gens font leurs courses», commente un militant. Des militants PS pourraient-ils rejoindre les rangs des «anti-austérité»?

Au niveau national, des parlementaires PS, à l'instar de la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann ont annoncé qu'ils se désolidarisaient du gouvernement et voteraient contre la ratification du traité. Mais sur le terrain, à Amiens, pas de trace de militants PS ou Europe Ecologie-Les Verts (EELV), lors de la réunion «anti-austérité» ou place Gambetta, samedi dernier.

Un des premiers signes d'élargissement du cercle des militants «anti-austérité» est venu de Christophe Saguez, secrétaire de l'UD CGT de la Somme, qui, joint par téléphone, appelle, à l'instar de la centrale, à manifester le 30 septembre: «Nous sommes pour une Europe plus sociale. Ceux qui soutiennent de traité sont anti-européens », tempète-t-il. « Ils font croire aux gens que l'Europe ne peut être que synonyme de chômage et de misère».

Dans l'œil du Télescope

Correction le 02/10/12:

«Salle Dewailly» remplacé par «Salle des provinces»